Vagabondages ligériens entre amis (1)

La Loire à Langeais - Quitou Wine Travel en Loire - Touraine - Juin 2015
La Loire à Langeais – © Quitou.com

Pourquoi là?

Tranquilles et confiantes, les rives et règes nous attendaient sans sourciller, entourant le fleuve-roi, chargé d’histoire et de nos histoires. La douceur était là, tant dans l’air encore quelque peu humide mais cotonneux et caressant la peau que dans mon plaisir intime à retrouver ces terres familières et à y emmener la troupe amie qui, une fois encore, m’avait accordé sa confiance.

La Loire, théâtre magistral de haut faits historiques, politiques, stratégiques et guerriers…

La Loire, mémoire bien vivante des transports fluviaux de jadis, si longtemps préférés à l’acheminement terrestre parce que plus sûrs et plus rentables.

La Loire aussi, terre de refuge et d’accueil des Rois de France, lorsque la vie couronnée parisienne et la démesure qui l’accompagnait se déplacèrent en Touraine, au grand dam de beaucoup, là où le destin du pays se décidait dans les recoins cachés des salles aux murs épais en pierres de tuf et autour des alignements de buis, dans des jardins savamment pensés qui permettaient une certaine discrétion. Là aussi où se tramaient nombre d’alliances et de complots et où le sort de certains hommes devenus redoutables parce que trop influents se scellait, presque toujours à leur insu.

Maurice Genevoix - RaboliotLa Loire encore, merveilleux berceau de vignes enracinées, dont le jus et les tableaux naturels furent glorifiés dans les textes par de si grands hommes de lettres.

François Rabelais, Honoré de Balzac et puis, ce merveilleux auteur local qui allait par ses mots simples et magnétisants m’ouvrir définitivement les portes du pays de la lecture, après la précieuse impulsion donnée par Henri Bosco (l’Enfant et la rivière), l’incontournable Maurice Genevoix.

Raboliot, la Forêt Perdue,… Puissants textes connectés à l’environnement, capables d’émouvoir petits et grands pour tant de motifs distincts et parfois réunis. Le reflet des eaux y est omniprésent, je m’y suis souvent laissé dériver.

La Loire également, où s’est tramée une parenthèse qui n’en a que le nom.

La Loire toujours, où fourmillent tant d’artisans vignerons, dont la plupart se placent au service de la terre qui leur a été confiée et non de leur orgueil. Terre que beaucoup mettent un point d’honneur à rendre encore plus vivante avant de la transmettre à leurs successeurs. Comme s’ils la préparaient doucement pour leurs enfants ou ceux qui voudront bien reprendre. Philippe, Laurent, Xavier, Guillaume et Adrien, comme d’autres, de plus en plus nombreux, vous faites partie de ceux-là et l’authenticité de votre démarche a touché notre joyeuse troupe.

La Loire enfin, théâtre estival pendant tant d’années de mes premières aventures et escarmouches de gamin, entre campagne, vignes, forêts et rivières, avant de devenir bien plus tard le lieu émotionnellement privilégié de mes pérégrinations viticoles. De Cosne-sur-Loire aux berges du Layon, j’y ai pas mal bourlingué, m’autorisant de temps à autre une incursion isolée jusqu’à l’Atlantique, tire-bouchon, rillettes cuites au chaudron et verre tendu remplaçant au fil des ans et sans états d’âme la canne à pêche de mon enfance, les asticots et lorsque la maladresse m’oubliait, un seau de petits vairons dont la destination unique était la poêle et un arrosage finement citronné.

Le fil de ce fleuve inspirant a toujours su m’attraper, à sa manière, au rythme de son écoulement. D’inaltérables souvenirs canailles, de précieux premiers élans vers les vignes et l’exploration quasi systématique des châteaux et de leur histoire puis, le temps passant, l’enracinement de relations privilégiées avec les acteurs du vignoble, essentiellement en Touraine mais pas seulement. Un fleuve aimé-aimant… dans le sens qui vous convient le mieux.

A l’aube du premier jour, bulles et croissants…

Au réveil du jour tant attendu, le 14 mai 2015, charger les caisses pour anticiper les risques de déshydratation de la bande, vérifier la température du vouvray pétillant prévu pour accompagner les croissants, sonder l’état des rillettes pour ceux qui oseront puis passer en revue les derniers détails de préparatifs avec Catherine, fidèle complice de nos expéditions. Ne pas traîner, la route étant longue. C’est à 6h que nous avons donné rendez-vous à nos sbires. Ils arrivent au compte-goutte, les paupières encore gonflées, certains remplaçant les poignées de main frileuses du passé par des étreintes qui disent le plaisir qu’ils éprouvent à se retrouver. A ce moment déjà, je ressens le frisson de bien-être offert par leur rassemblement.

Chargement impatient du matériel pédagogique liquide dans les soutes, instructions de route vérifiées avec nos deux chauffeurs qui ne laisseraient personne les remplacer pour nous amener à bon port. Driss, qui ne boit pas de vin, était malade disait-on au bureau. Guérison miraculeuse en une nuit par effet collatéral… Ou Lourdes-sur-Jette si vous préférez…

C’est un cœur assez léger mais malgré tout encombré par des évènements moins porteurs qui prend place au-devant du car. Les pensées me ramenant au fleuve sont un précieux baume intime posé sur les blessures vivantes. Il me hâte de fouler les berges, observer les bancs apparaître et s’immerger lentement, l’air de rien, guetter le mulet qui nargue la nasse, écouter les migrateurs bien inspirés qui ont choisi d’y faire étape.

Il me tarde de revoir un ami trop longtemps éloigné.

Notre périple peut commencer… Langeais, première étape d’un parcours de trois jours qui aurait pu durer trois semaines tant le choix des lieux et des rencontres fut difficile. Langeais la belle. Son château urbain et son pont nous attendent de même que la pluie et un Caillou pas comme les autres, du moins selon les prévisions.

Vouvray pétillant de Vincent Raimbault
© Quitou.com
Vouvray pétillant de Vincent Raimbault au petit déjeuner...
Petit déjeuner au Vouvray pétillant de Vincent Raimbault … © Quitou.com

En attendant, et sans prendre cette fois la précaution de tirer les petits rideaux pour occulter au yeux de la maréchaussée notre forfait, c’est avec le sentiment de poser un acte indispensable pour lancer véritablement notre voyage que nous faisons sauter les premiers bouchons d’une longue série, en accompagnement des croissants. Cette fois, c’est parti. Rien ne peut nous arrêter.

Une terre chaleureuse nous attend.

Q.


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