Dans le cercle des grands vins blancs secs, un quidam béarnais

France – Sud-Ouest – Pacherenc du Vic-Bilh sec
Château d’Aydie « Odé d’Aydie 2011 »

En dégustation, un des plus grands écueils porte un nom : le conditionnement…

Vignoble du Château d'Aydie
Vignoble du Château d’Aydie

Conserver une indispensable indépendance d’esprit, c’est accorder toutes ses chances au vin qui se soumet à notre jugement. A l’écart des influences qui nous guettent de toutes parts.

Cette évidence rentre pourtant souvent en conflit avec notre fâcheuse propension à prendre les choses non pour ce qu’elles sont réellement, mais pour le nom qu’elles portent et à leur attribuer automatiquement les vertus qu’on leur prête habituellement.

Image1Lorsque nous abordons un vin dans cette disposition d’esprit, les éléments parasites qui nous éloignent de notre quête sensorielle ne manquent pas : vieilles bouteilles, appellations réputées, belles étiquettes, millésimes flatteurs, prix élevés…

Un autre piège a une origine « spirituelle » : croire préférer les vins de telle ou telle région, ne pas apprécier telle ou telle appellation, perpétuer les goûts de la tradition familiale en s’identifiant à ceux-ci sans prendre de recul…


Ceci ne risque pas de vous arriver si, par chance ou par choix, vous rencontrez celui qui s’est présenté à mes papilles au cours d’une dégustation insolite. La raison en est simple : depuis le 11ème siècle, ce terroir solidement ancré dans l’histoire de la viticulture gasconne privilégie d’autres spécialités, qui jouissent d’une plus grande notoriété. Donc, aucun préjugé à l’horizon.

Le pacherenc du vic-bilh sec « Odé d’Aydie 2011 » de la famille Laplace est arrivé sans s’annoncer, alors qu’il faut bien l’avouer, je trépignais d’impatience en pensant aux dégustations qui m’attendaient, celles des moelleux de l’appellation et des célèbres rouges de Madiran, issus des mêmes terres gasconnes.

Où sommes-nous ?

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Ce vignoble du Sud-ouest s’étage dans les splendides paysages vallonnés du « Vic-Bilh » (vieux pays en gascon), qui offrent une vue panoramique sur la chaine pyrénéenne, distante d’à peine soixante kilomètres.

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L’appellation Pacherenc du Vic-Bilh concerne 300 hectares, entièrement compris dans la zone d’A.O.C bien plus large de Madiran, qui s’étend sur 1300 hectares. Elle tire son nom quelque peu iconoclaste du béarnais « paisheradas », et signifie « vigne conduite en échalas du vieux pays ». Les vignes du Vic-Bilh sont attachées à des piquets plantés en rangs (pachet-en-rènc) sur les coteaux de la rive gauche de l’Adour. Elles sont souvent conduites en hauteur, pour éviter les gelées locales, courantes au niveau du sol.

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Pour l’élaboration des vins blancs de la région, des cépages aux noms hirsutes, que seuls les amateurs éclairés connaissent : petit manseng, gros manseng, arrufiac, petit courbu…

L’appellation locale est surtout connue pour ses moelleux, qui présentent l’avantage d’associer une belle vivacité à l’onctuosité.

Les blancs secs représentent plus d’un tiers de la production. Autant le savoir, bien peu de ces bouteilles arrivent jusqu’en Belgique, même si quelques cavistes sérieux et avides de découvertes se targuent d’en défendre les atouts, par l’importation de l’un ou l’autre flacon digne de son terroir.

Pacherenc du Vic-Bilh… Mon carnet du jour met à l’honneur un fleuron de l’appellation, hors des sentiers viticoles classiques.

 

Odé d’Aydie 2011 – Château d’Aydie – Famille Laplace

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© JCC

Issue de vignes âgées de 15 à 20 ans sur des coteaux argilo-graveleux exposés sud-ouest, cette cuvée de haut rang fait la part belle à la star régionale. Son assemblage met en relief le petit manseng (70%), qui ne tolère cette fois à ses côtés que son traditionnel complice, le gros manseng (30%).

La teinte dorée assez soutenue du vin révèle un grand éclat. Limpidité et brillance, pour une robe nette et avenante.

Dès l’ouverture, le ton est donné : l’opulence olfactive, empreinte de complexité, mérite la plus grande attention. Auguré par les fleurs parfumées du premier nez (glycine, lilas blanc), qui ne font toutefois que passer, le voyage promet d’être passionnant. Au fil de l’aération, un festival de fruits mûrs se livre sans retenue (pêche, ananas, abricot). Sans aucune lourdeur cependant, le bouquet associant maturité et tonicité. Il se complète ensuite d’une fine touche vanillée de grand charme.

Au moment de vérifier les promesses du nez, un impératif : mobilisation de tous les sens ! A vrai dire, le suspense ne dure pas longtemps. A la palette aromatique épurée répond une bouche davantage sur la tension que sur l’épaisseur, démonstrative et tout en pulpe. J’adore.

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© Véronique Roelandt

Démontrant une structure dense et savoureuse, l’ensemble délivre une réelle énergie, brillant par une grande maturité de fruit (saveurs de pêche, mirabelle) mais sans aucun excès. L’acidité est omniprésente, gage d’équilibre tout au long de la dégustation.

La finale ne manque ni de longueur ni de précision. Elle brille par sa fraîcheur et sa sensualité, évoquant cette fois le zeste d’agrumes.

Chais de vinification du Château d'Aydie
Chais de vinification du Château d’Aydie

Ce vin est un ambassadeur. Par sa pureté, il fait honneur à son appellation et donne une lecture limpide du terroir et de ses cépages.

Dernière précision : les autres productions du Château d’Aydie, tant en moelleux qu’en rouge, méritent aussi notre intérêt. Un domaine de toute confiance.

Pour l’accompagner ? Je pense à un chèvre chaud aux raisins secs ou à la gelée de coing mais l’imagination pourrait nous mener vers les sushis, salades de fruits de mer, thon à la basquaise ou curry de volaille. Dans son style franc et élancé, le choisir comme apéritif est un maître-choix.

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Température de service ? Vous servirez le pacherenc du Vic-Bilh sec à 10-11°C et veillerez à le déguster dans ses trois premières années, pour bénéficier pleinement de son fruité intense et juvénile.

Une appellation à (re)découvrir!

Q.

Pour en savoir plus sur le château Aydie, cliquer ici

 


4 réponses à “Dans le cercle des grands vins blancs secs, un quidam béarnais”

  1. Merci Quitou de nous faire voyager dans cette belle région reculée.
    J’avais déjà gouté du moelleux mais ce sec est très tentant!
    Cela se trouve facilement?
    Baud

    • Ce sont effectivement des vins trop souvent (et malheureusement) oubliés! Les vins du Château d’Aydie dépassent fort heureusement les frontières. leurs auteurs s’y emploient! Une petite recherche Google devrait permettre de les trouver sans trop de difficulté 🙂
      Si besoin d’aide, ne pas hésiter!

    • A l’écart des sentiers viticoles classiques, tant de surprises nous attendent… Restons ouverts et curieux vis-à-vis de tous ces vins « oubliés » du circuit de consommation classique!

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